Le château de Beaulieu, restaurant authentique entre terre et étoiles
Repris en 2021 par Delphine et Christophe Dufossé, le château de Beaulieu, dans le Pas-de-Calais, n’est pas seulement un superbe hôtel et un restaurant doublement étoilé : c’est aussi un étonnant écosystème qui tend à l’autosuffisance. Visite guidée.
Philippe Martin
Suivre Christophe Dufossé lorsqu’il vous entraîne à travers les neuf hectares de son domaine, c’est avoir l’impression de se retrouver dans un album illustré de “Martine à la ferme”. Le propriétaire du Château de Beaulieu vous emmène d’abord dans son immense potager où de beaux artichauts côtoient tomates bien mûres ou potirons géants, et des légumes de la région comme l’ail du Nord, la carotte de Tilques ou le chou frisé.
Puis son verger où fraises, framboises et rhubarbes mûrissent à l’ombre des pommiers et des poiriers, son jardin aromatique aux odeurs entremêlées, et enfin sa basse-cour, paradis des enfants, où ânes, chèvres, moutons et oies répondent quand il les appelle par leur nom. Sans parler de ses ruches dont les abeilles produisent un miel 100 % naturel.
Un restaurant deux étoiles Michelin
Notre homme n’est pas devenu fermier pour autant, même s’il s’est équipé d’un superbe tracteur. Il travaille avec cinq jardiniers et les agriculteurs du coin, afin de n’utiliser en cuisine que des produits frais du terroir, et son pain entièrement réalisé dans une aile du château par son propre boulanger. Christophe Dufossé demeure avant tout un authentique restaurateur. Et pas n’importe lequel : depuis qu’il a repris avec son épouse Delphine le Château de Beaulieu, à la lisière des départements du Nord et du Pas-de-Calais, il ne lui a fallu que deux ans pour décrocher deux étoiles au Guide Michelin !
Plus la fameuse “étoile verte” à laquelle il tient beaucoup, car elle symbolise sa volonté profonde de développement durable, répondant à des critères aussi pointus que la récupération des déchets, l’usage des circuits courts, la permaculture, l’agroécologie, la pollinisation des légumes ou encore l’irrigation par arrosage naturel.
Piscine, sauna, hammam et retour aux sources
Sacré pari au demeurant que d’avoir repris, en juin 2021, soit au cœur de la crise Covid, l’ancien hôtel-restaurant Meurin qui fut autrefois la propriété d’un riche notaire, et dont les fondations remontent à 1680. Le magnifique bâtiment de briques rouges avait besoin d’un sacré coup de neuf. « Et nous voulions l’agrandir, en particulier le doter d’un spa qui permette à nos hôtes de se détendre sans quitter l’établissement », précise Delphine Dufossé. Plusieurs mois de travaux pour la rénovation, un an de plus pour le spa, qui comprend désormais piscine avec couloir de nage, hammam, sauna, fitness et centre de soins. Plus de 6 M€ de travaux, financés en partie sur emprunts, avec un coup de pouce de deux collectivités, la Région des Hauts-de-France et la Communauté d’agglomération de Béthune-Bruay.
Delphine et Christophe Dufossé ont l’habitude de ce genre de pari un peu fou. Pendant quinze ans, ils ont tenu le célèbre établissement La Citadelle en plein centre de Metz, après avoir fait leurs preuves en Bourgogne au Domaine de Roncemay, un hôtel-restaurant-golf à Aillant-sur-Tholon. « Mais nous étions devenus des chefs d’entreprise, explique Delphine Dufossé, on n’avait plus le temps d’exercer nos vrais métiers, l’accueil pour moi, la cuisine pour Christophe. Et on avait envie de revenir dans notre région d’origine ».
Un accueil simple et chaleureux
Au Château de Beaulieu, Christophe Dufossé, natif de Calais, « joue à domicile ». Il est redevenu un chef, et pas n’importe lequel, formé au fil des ans aux plus belles tables de France, chez Alain Ducasse à Monaco ou à l’Eden Roc au Cap d’Antibes, décrochant sa première étoile à 29 ans. Son menu “Détour de saison” propose nombre de ses “plats signature” comme la “Joue de cochon des Hauts-de-France” (cuisson lente 8 heures, servie fondante en croûte de pain d’épices maison, échalotes de Busnes cuisinées à la bière) ou le “Cœur de truite en trois cuissons”, (truite de la pisciculture d’Anzin-Saint-Aubin, caviar de Sologne, ravioles artisanales au chèvre frais).
« partir d’un terroir vivant, suivre la Nature dans ce qu’elle propose de meilleur »
Et l’on pourrait continuer longtemps ainsi, puisque le menu complet, “Au détour des saisons”, comprend sept services ! Avec pour chaque plat, son leitmotiv, « partir d’un terroir vivant, suivre la Nature dans ce qu’elle propose de meilleur, flirter avec l’autosuffisance et atteindre une certaine quiétude ».
Et de proposer aussi, dans la “Brasserie côté jardin”, des plats plus simples mais toujours subtils, comme la “terrine d’asperges blanches, champignons du moment” ou le “quasi de veau fermier aux pommes Rattes du Touquet”. Le tout servi dans une ambiance sympathique et décontractée.
Ce qui plaît beaucoup aux visiteurs, qu’ils viennent de l’Angleterre toute proche, ou bien en famille avec des enfants ravis de rendre visite aux animaux, ou encore de Paris, tel cet homme d’affaires propriétaire d’un hélicoptère et qui n’hésite pas à venir à bord de son appareil et à se poser dans le petit héliport aménagé au fond du parc ! Car c’est sans doute cela qui frappe le plus quand on découvre le château de Beaulieu, outre l’incroyable beauté du parc : l’accueil simple et chaleureux, propre aux gens du Nord, très loin des attitudes guindées que l’on observe souvent dans ce genre d’établissements. Et ça, ça n’a pas de prix.
Reportage complet à retrouver dans notre n°172, à paraître en septembre 2024.