Sur les traces des moines disparus
L’abbaye de Boscodon, chef-d’œuvre médiéval des Hautes-Alpes, est au cœur d'un nouveau circuit de randonnée. Une balade à la découverte de l'ordre disparu des moines chalaisiens.
Margaïd Quioc
L’abbaye de Boscodon, chef-d’œuvre médiéval des Hautes-Alpes, est au cœur d’un nouveau circuit de randonnée. Une balade à la découverte de l’ordre disparu des moines chalaisiens.
A 1.150 mètres d’altitude, Boscodon est un site qui se mérite. Surtout si l’on y accède à pied ou en VTT.
A seulement quelques kilomètres de la petite ville d’Embrun, le lieu respire la nature et le calme. Les randonneurs découvrent d’abord un chef d’œuvre de l’art roman du XIIe siècle. Mais aussi un lieu de vie. Quelques moines y ont élu domicile, ainsi qu’une herboriste et un tailleur de pierre. Une librairie s’est installée dans l’abbaye.
Difficile d’imaginer qu’en 1972, cet ensemble abbatial n’était plus qu’un hameau rural abandonné. Il est sauvé de l’oubli quand un habitant de la région et une religieuse découvrent par hasard l’histoire des moines chalaisiens. Cet ordre monastique s’est établi en Haute-Provence au XIIe siècle, dans un triangle compris entre Arles, Grasse et Vienne. Il n’a perduré que trois siècles avant de disparaître, et leurs abbayes et prieurés sont petit à petit tombés en ruine.
Au début des années 2000, l’association des Amis de Boscodon se retrousse les manches pour restaurer l’ensemble du site. Les travaux sont terminés depuis 2012. Désormais un nouveau chantier s’impose. Faire vivre l’histoire des moines chalaisiens.
C’est tout l’objet d’un nouveau circuit de randonnée, inauguré le 31 mai dernier. Une balade à destination des familles, des amoureux de nature ou de marches spirituelles. Baptisé « itinéraire touristique des abbayes chalaisiennes », il colle au plus près du mode de vie des moines.
« On a cherché dans les circuits de randonnée existant les anciennes drailles provençales, des chemins muletiers de transhumance qu’ils empruntaient » commente Daniel Meyer, membre de l’association des amis de Boscodon. Répondant à l’air du temps, une option « gravel » du parcours a été mise en place. Cette pratique cycliste, à mi-chemin entre le vélo de route et le VTT, fait de plus en plus d’adeptes.
Le projet est également porté par l’association des amis de Clausonne, une autre abbaye chalaisienne située plus à l’est, dans le même département.
Relier entre eux les 123 sites chalaisiens
Cet édifice en ruines est le point de départ de l’itinéraire. De là, les randonneurs s’élancent à travers des paysages exceptionnels vers Valserres puis Boscodon, et enfin Laverq. Au compteur, 140 kilomètres, soit une semaine de randonnée à pied. Mais le chemin sur les traces de l’ordre de Chalais ne doit pas s’arrêter là. « On souhaite continuer vers Arles, en reliant entre eux les 13 sites chalaisiens » précise Daniel Meyer.
Un topoguide est disponible gratuitement en ligne et sur smartphone. 500 versions papiers sont mises en vente dans les librairies et offices de tourisme de la région. Une mine d’information sur l’ordre chalaisien… Mais surtout une ressource pour les randonneurs itinérants à la recherche d’un lit ou d’un couvert.
Daniel Meyer souhaite que l’itinéraire de randonnée soit un outil pour le développement économique du territoire. « On présente le projet communautés de communes. L’itinéraire peut fournir l’occasion de développer une offre de services pour les touristes. »
Le topoguide référence également des points d’intérêts locaux dont les visites sont payantes, comme le château de Tallard.
Cet aspect du projet a permis aux deux associations de remporter un financement de l’Europe grâce au fonds Leader (Liaison entre action de développement de l’économie rurale). La Région Sud a également apporté sa contribution. Les deux associations ont de leur côté apporté 10 % du budget total, qui s’élève à 150.000 €.
Une somme qui aidera également à financer l’autre volet du projet, loin des sentiers de montagne. « Nous avons la charge de gérer les archives de l’ordre de Chalais » rappelle Daniel Meyer. Soit 10.000 documents répartis dans diverses banques d’archives départementales, désormais référencée en ligne sur un site dédié et gratuit. Une mine d’informations pour percer les secrets de ce que Daniel Meyer nomme un « mystère du patrimoine en Provence ».
Margaïd Quioc