Etats généraux de l’Alimentation : en queue de poisson
Après cinq mois de travaux, les Etats généraux se sont achevés sur l’annonce de mesures concrètes, mais aussi avec l’absence du ministre de la Transition énergétique Nicolas Hulot. Et des décisions restrictives concernant la filière bio.
Cinq mois d’ateliers, de débats, d’événements régionaux. Quatorze ateliers nationaux réunissant 700 participants. 16.000 réponses lors de la consultation publique : on attendait beaucoup de la clôture ces Etats généraux de l’Alimentation qui se sont achevés le 21 décembre (lire dans Régions Magazine n°140 notre dossier “L’agriculture, les régions et l’Europe”). Certes, le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert a confirmé l’engagement collectif du gouvernement sur “l’économie des filières agroalimentaires, sur la prise en compte de l’alimentation comme déterminant majeur de la santé, sur la transition écologique des filières agricoles, sur la solidarité à l’égard des plus démunis et sur des relations de qualité entre acteurs économiques, consommateurs et citoyens”. Certes, il a confirmé qu’une loi allait suivre ces Etats généraux, notamment pour rénover le cadre des négociations commerciales, un des thèmes chers au président de la République Emmanuel Macron. Toutefois, la clôture de l’événement a été marquée par deux événements à la connotation plus négative.
D’abord, l’absence du ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot, qui a volontairement “boudé” la fin des travaux, estimant que “le compte n’y était pas, pas à la hauteur du travail extraordinaire et des propositions qui ont été faites dans les ateliers”, marquant du même coup le désaccord qui l’a opposé depuis le lancement de l’opération, au ministre de l’Agriculture Stéphane Travert. A ses yeux, la discussion a surtout porté sur les problèmes de filières et de fixation des prix, pas assez “sur une modification en profondeur du modèle agricole français s’appuyant sur une alimentation saine, sûre et durable.”
Autre déception : celle qui concerne la filière bio. En effet, si le Premier ministre Edouard Philippe a bien confirmé l’objectif de 15 % de surface agricole bio en 2022, contre 6 % aujourd’hui, ou encore celui de “50 % de produits bio, locaux ou écologiques dans la restauration collective d’ici la fin du quinquennat” (chiffre qui serait inscrit dans la future loi), il n’est pas revenu sur la décision gouvernementale de réduire la durée des aides aux agriculteurs qui souhaitent se reconvertir à l’agriculture biologique. Ces aides étaient, jusqu’à présent, versées sur une période de dix ans et seront réduites à trois ans. Le gouvernement a également supprimé les aides au maintien en agriculture biologique (au titre de rémunération pour service environnemental rendu).
Dans ce contexte, la Fédération nationale de l’Agriculture biologique a souligné que “M. Travert ampute de cinq ans les aides ouvertes aux producteurs bios, marquant ainsi un recul historique et revenant à la situation déséquilibrée d’avant 2010. Mais le gouvernement ne s’arrête pas en si mauvais chemin : non content de supprimer l’aide au maintien, il prévoit également de réduire à trois ans l’aide à la conversion, selon les contacts de la FNAB en Région. En trois mois, les agriculteurs qui souhaitent passer en bio ont donc perdu sept ans de soutien financier, et le gouvernement a perdu la confiance des producteurs bio”, a souligné la fédération.
A noter que les Régions, pourtant concernées au premier chef par la politique agricole, sont restées silencieuses tout au long de ces Etats généraux, préférant faire porter leurs efforts sur la défense de la PAC (Politique agricole commune) de l’Union européenne, et sur sa simplification.
Une nouvelle politique de prix
L’un des volets les plus ambitieux des réformes envisagées concerne la politique des prix agricoles. Pour le ministre Stéphane Travert, il s’agit de “rénover les relations économiques entre les acteurs des filières agro-alimentaires”, notamment grâce à l’établissement de contrats proposés par les producteurs ou les organisations de producteurs, et non par les distributeurs. La “renégociation pour prendre en compte les variations des cours des matières premières dans les contrats sera facilitée, et le recours à la médiation renforcé”, stipule le projet.
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