Polémique autour du calendrier des élections régionales
La possibilité d’un report pourrait fissurer le front uni des présidents de Régions.
Philippe Martin
La possibilité d’un report pourrait fissurer le front uni des présidents de Régions.
Tout au long de l’épidémie et de la période de confinement, les présidents de Région, souvent en première ligne, ont présenté un front uni, formant un véritable “pack” comme aime à le dire le président de Régions de France Renaud Muselier, et évitant dans la mesure du possible toute polémique avec le gouvernement. Mais il semble que la question du calendrier électoral risque de créer une brèche dans ce bloc soudé.
A l’origine, la rencontre de lundi entre le président de la République Emmanuel Macron, et Renaud Muselier, accompagné du président délégué de Régions de France François Bonneau. Une rencontre qui semble s’être déroulée dans le meilleur esprit : “un calendrier rapide, une méthode claire, une relance efficace”, énonce Renaud Muselier à sa sortie de l’Elysée, faisant état d’un “échange direct et respectueux : une méthode de travail a été envisagée pour la relance, les fonds européens, les contrats de plan État-Régions, une grande initiative autour des libertés locales et le traitement des budgets des Régions 2020 et 2021.
Rendez-vous a été pris pour engager une séquence de discussion entre l’Élysée et les Régions afin qu’à la mi-juillet, les grands axes d’un contrat de plan entièrement renouvelé puissent être arrêtés pour engager la relance et la reconstruction de la France.”
Mais très vite, une polémique inattendue va naître. Lorsque Renaud Muselier rend compte de cette rencontre en vidéoconférence auprès de ses collègues présidents de Région, comme il en a pris l’habitude depuis le début du confinement, la question du calendrier électoral est évoquée. Selon le quotidien Le Figaro, relayé par plusieurs journaux régionaux, le président de la République aurait en effet proposé un marché au patron de Régions de France. En gros, le gouvernement aidera financièrement les Régions à faire face à leurs obligations liées à la relance économique, si celles-ci acceptent de décaler les élections régionales toujours prévues en mars 2021 !
Une forme de “chantage” que Renaud Muselier conteste formellement : la question du report des régionales n’aurait été évoquée qu’“au regard de la mise en œuvre du plan de relance à l’automne”. Mais le mal est fait : plusieurs présidents de Région réagissent au quart de tour.
Pour Valérie Pécresse (Île-de-France), “reporter les élections n’est pas un choix de convenance personnelle”. Pour Xavier Bertrand (Hauts-de-France), il s’agit d’un “chantage”, lié à la “raclée que La République en Marche a prise et va prendre aux municipales. Aux élections régionales, ce sera exactement la même chose et le président de la République ne veut pas qu’à un an de la présidentielle, il y ait une autre raclée pour la République en Marche”.
Chantage ou logique d’intérêt général ?
Même Christelle Morançais, la très mesurée présidente des Pays de la Loire, y ajoute son grain de sel : “Un report qui arrangerait le président de la République au profit des présidents de Région, ce marchandage est indigne de la période que nous vivons et totalement en contradiction avec la façon dont nous avons su gérer la crise en lien étroit avec l’Etat. Il y a un calendrier électoral, il faut s’y tenir, point”.
Pour sa part, Renaud Muselier a publié mardi une tribune dans le quotidien Libération, sous le titre “Ne rejetons pas d’emblée un report des régionales”. Il y a écrit notamment : “Nous avons fixé un agenda qui doit déboucher sur un accord politique au mois de juillet, écrit-il. Dans ce cadre nous avons échangé sur le calendrier électoral afin qu’il ne percute pas la relance. S’il faut soigneusement peser le pour et le contre d’une telle idée, il ne me semble pas qu’elle doive être d’emblée rejetée. Elle peut s’inscrire dans une logique d’intérêt général pour notre pays. La situation est grave, nul ne peut l’ignorer, et nous devons agir avec la conscience de l’urgence et une très grande détermination.”
Au-delà des polémiques, le débat est donc ouvert. Faut-il maintenir le calendrier tel qu’il était prévu, avec des élections en mars, simultanément au scrutin départemental ? Ou les décaler pour permettre aux Régions de faire face à la relance économique, où elles auront un rôle de premier plan à jouer, sans être polluées par le climat d’une campagne électorale ? Les jeux ne sont pas faits. Et le fait que plusieurs présidents de Région (Valérie Pécresse, Xavier Bertrand, Laurent Wauquiez, ou d’autres) soient autant de candidats potentiels à l’élection présidentielle, ne va évidemment pas simplifier les choses.
Philippe Martin
🗳 Report des élections régionales ?
➡️Les Français nous attendent sur les vraies priorités : sauver notre économie et nos emplois !
Il y a un calendrier électoral, il faut s’y tenir : point.👇🏻 pic.twitter.com/qpOfN5oq3b— Christelle MORANÇAIS (@C_MORANCAIS) June 17, 2020
Il ne saurait y avoir ni chantage ni petits arrangements, et les régions ne seront pas une variable d’ajustement ! Seul l’intérêt général et la relance de notre pays doivent compter aujourd’hui. Tout le reste n’est que commentaire et bavardage. https://t.co/WVxELfXiQL
— Renaud Muselier (@RenaudMuselier) June 16, 2020