Les collectivités ont leur ministre
Et même trois pour le prix d’une. Avec Jacqueline Gourault aux manettes, les fils du dialogue vont-ils être renoués ?
Philippe Martin
Et même trois pour le prix d’une. Avec Jacqueline Gourault aux manettes, les fils du dialogue vont-ils être renoués ?
Du côté des collectivités, on attendait beaucoup de ce nouveau remaniement qui aura pris près de deux semaines pour voir le jour. Le départ de Jacques Mézard était acté, l’arrivée d’un ministre à part entière en charge des collectivités également, et le nom qui circulait le plus était celui de Jacqueline Gourault.
Et c’est bien celui qui a été choisi. L’ancienne “ministre auprès du ministre de l‘Intérieur”, devient cette fois ministre de la Cohésion des Territoires et de relations avec les collectivités territoriales, et elle à son tour flanquée de deux “ministres auprès de la ministre”, Sébastien Lecornu (collectivités territoriales) et Julien Denormandie (ville et logement).
Dire que cette triple nomination a fait couler des torrents d’enthousiasme serait sans doute exagéré, s’agissant d’une élue dont Hervé Morin, le président de Régions de France affirmait au récent congrès de Marseille qu’elle “vivait sur une autre planète”… Mais l’élue du MoDem peut au moins se prévaloir d’une fine connaissance des collectivités, elle qui a été, entre autres, maire de La Chaussée-Saint-Victor pendant 25 ans, présidente de la communauté d’agglomération de Blois, conseillère générale du Loir-et-Cher pendant treize ans, conseillère régionale de la région Centre pendant neuf ans, sénatrice du Loir-et-Cher depuis 2001 et vice-présidente de l’Association des maires de France de 2004 à 2014 !
Sa nomination semble au demeurant marquer un tournant dans les très difficiles relations entre le gouvernement les grandes associations de collectivités. Car ce véritable “pôle ministériel” qui leur est entièrement dédié et ne dépend plus du tout du ministère de l’Intérieur, arrive dans un contexte plus favorable que le précédent. “Il n’y a jamais eu de cassure totale avec les élus, nous avons peut-être à recoudre le tissu des collectivités territoriales”, a d’emblée affirmé la nouvelle ministre, et nous “voulons reprendre le dialogue avec eux”.
Un “reset” des relations avec les territoires
Par ailleurs le président de la République, passant au-dessus de la tête du Premier ministre, a repris lui-même les rênes du dialogue en rencontrant successivement Hervé Morin, le président du Sénat Gérard Larcher et celui de l’Assemblée des Départements de France Dominique Bussereau.“J’ai retenu les mots du président de la République disant qu’il voulait un ‘reset’ des relations avec les territoires”,a déclaré Hervé Morin. “Entre la recomposition gouvernementale et les entretiens du chef de l’État” avec les élus locaux, “ce sont des signaux qu’il faut entendre”.
Il faut tout de même rappeler que les trois grandes associations d’élus (AMF, ADF, Régions de France) ont boycotté la dernière Conférence Nationale des Territoires, ont lancé à Marseille le 27 septembre l’appel pour la défense des libertés locales, un début de “fronde” adoubé par plus de 1.500 élus. Et que le les sujets de fâcherie ne manquent pas : réforme de l’apprentissage rejetée par les Régions, de la taxe d’habitation décriée par les communes, difficultés financières des départements, etc.
Pour sa part le ministre sortant Jacques Mézard n’a pas épargné l’exécutif en place, jugeant que la “concentration des pouvoirs entre les mains de ce qui est perçu, à tort ou à raison, comme une technocratie, un milieu restreint” alimente “la défiance et le sentiment d’abandon”.
Belle critique du macronisme, et une jolie feuille de route pour celle et ceux qui lui succèdent…